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Trois façons d’interrompre un comportement gênant sans rien dire.

Un jour, j’avais gardé Jean-Vahissant avec moi en retenue. J’étais son professeur principal et il gênait de nombreux cours. En même temps que nous mettions de l’ordre dans son matériel scolaire, nous avions cette conversation :

Jean-Vahissant, tu t’es fait remarquer dans plusieurs cours. Pourtant je te vois capable d’être sérieux et de faire des efforts. Alors, dis moi un peu, que se passe-t-il ?

Il me répondit :

" Avec vous, Madame, c'est calme ! Je sais pas comment vous faites, c'est sPykologik ! "

Jean-Vahissant n’avait pas perçu les nombreuses techniques que j’utilise pourtant constamment dans ma classe. Il n’en voyait que les résultats.

Comme tout le monde, je suis régulièrement confrontée à des élèves récalcitrants qui m’obligent à intervenir de manière ostensible. Mais, dès que je le peux, je rends ma gestion de classe quasi imperceptible. Voici, par exemple, trois des stratégies qui me permettent d’interrompre un comportement gênant sans avoir à dire un mot.

La technique ” Chercher du regard “

Pour des dysfonctionnements minimes, comme du bavardage ou de la rêverie, je n’interromps pas mon propos. En revanche, tout en continuant à parler, je vais commencer à fixer Marie-Distraite : je cherche à accrocher son regard. Dès qu’elle me voit, je fais un signe : doigt pointé vers la consigne non réalisée, vers la phrase à recopier … et je poursuis mon cours.

Plus je garde un air neutre et détaché, mieux cela fonctionne. La technique ” chercher le regard ” ce n’est pas faire les yeux revolvers ! Si je prends l’air agacé ou mécontent, mon message perd en clarté. L’objectif est de communiquer ” tu dois modifier quelque chose ” et non pas ” tu as réussi à me mettre en colère “.

Pourquoi ça marche : l’élève est reconnaissant que je lui fasse un rappel à l’ordre en toute discrétion. La probabilité est alors forte qu’il coopère. Pendant ce temps, la classe n’a pas été déstabilisée, elle a pu rester absorbée à sa tâche.

La technique ” Envahisseur de l’espace “

Voilà maintenant 3 ou 4 fois que je fais des regards appuyés à Jean-Filou et il continue à ne pas prendre le cours en note. Je vais alors m’approcher nonchalamment de lui et je commence à toucher son cahier, entrouvrir sa trousse et je vais lui dire à voix basse :

“Jean-Filou, je vois dans ton cahier que tu n’as pas encore écrit, as-tu besoin que je t‘aide pour savoir où noter la phrase ?

ou encore :

“Marie-Rebelle, je vois que tu n’as pas encore collé ton document, as-tu besoin d’être dépannée d’une colle ? “

En réalité, il s’agit de faire deux choses : j’envahis l’espace vital de Jean-Révolté pour affirmer que je suis maître à bord mais en même temps je prétexte une intention positive. Ainsi, mon intervention ne pourra pas être considérée comme agressive. C’est aussi pour cela qu’il est nécessaire d’avoir tout cet échange à voix basse : je n’adresse pas de reproche public à Marie-Tornade.

Précisons que l’utilisation du mot ” encore “ dans les formulations précédentes est décisive. J’indique ainsi à l’élève que je pense qu’il va réussir ce que je lui demande au lieu de le blâmer de ne l’avoir pas déjà fait. Je lui dis implicitement : ” Tu es capable ! “.

Quand l’élève se redresse un peu, qu’il se retourne physiquement vers moi, qu’il reprend son cahier et son stylo dans ses mains, je sais que c’est gagné. Il va se corriger immédiatement.

Pourquoi ça marche : Marie-Dissipée a tellement l’habitude qu’on l’aborde avec agacement qu’elle sera décontenancée par ma bienveillance apparente. Cela suffit généralement, au moins pour un temps, à l’aiguiller vers le comportement souhaité. Pendant l’incident, une majorité d’élèves n’aura même pas vu que je l’ai recadrée. La classe pensera du coup : “Chez Madame KCl, même Marie-Dissipée travaille “.

La technique ” Pot de colle “

Si j’ai déjà utilisé les deux précédentes techniques sans succès avec Jean-Vahissant et qu’il persiste à ne pas satisfaire mes demandes, j’utilise la technique du pot de colle : je viens me mettre juste à côté de lui pour faire cours.

Ce peut être juste derrière lui. Je ne lui fais aucun commentaire, je garde une expression neutre sur mon visage, je continue mon cours, mais je reste gluée dans son dos.

Si Marie-Terrible est au premier rang, je continue de faire face à la classe, mais je pose mes deux mains sur son bureau. Même chose. Aucun commentaire, aucun froncement de sourcils, je fais cours, mais je reste anormalement près d’elle.

Pourquoi ça marche : si Jean-Vahissant et Marie-Terrible sont normalement constitués, le malaise qu’ils vont ressentir va les amener assez rapidement à modifier leur attitude. Dans tous les cas, j’ai montré à la classe que je sais d’où vient le problème et que je ne reste pas passive.

Et voilà : aucun carnet relevé, aucune menace proférée, aucun cri, aucune once d’énervement sur le visage du prof ! Votre Jean-Vahissant en concluera, très logiquement, que votre gestion de classe, c’est sPykologik !

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